Réchauffement climatique et santé : les risques
Auteurs :
- PERRIN Philippe (Eco-infirmier)
Réchauffement climatique et santé : les risques
Qu’on ne s’y trompe pas, la planète va bien et même avec beaucoup de mauvaise volonté, nous ne pourrons la « tuer »…
Elle a même connue des périodes nettement plus chaudes qu’aujourd’hui. Elle a su s’adapter à des événements d’ampleur catastrophique sans équivalent dans l’histoire humaine (chute d’astéroïdes…).
Non, vraiment, pas soucis, notre planète Terre à encore de beaux jours devant elle…
Le souci des chefs d’Etats qui travaillent actuellement à la réduction des émissions des gaz à effet de serre dans le cadre de la COP 21 vise donc non pas à « sauver la planète » mais plus simplement à sauver rien moins que « notre peau » !
Ils travaillent pour éviter de poursuivre dans cette voie de réchauffement qui au-delà de la limite fatidique des 2°C nous ferait basculer dans l’inconnu climatique le plus hasardeux… et le plus inconfortable.
Au-delà de 2°C, les experts internationaux s’accordent à dire que la machine climatique elle-même s’emballerait pour nous emmener vers des périodes d’une chaleur inconnue de toute l’histoire humaine…
Une simple poussée d’hyperthermie pour la planète, une menace de disparition pour l’humanité.
Si il n’est pas trop compliqué de s’imaginer quelques-unes des conséquences de cette évolution du climat sur notre environnement actuel (périodes de sécheresses plus marquées, hausse du niveau des mers, fonte des glaciers, vagues de chaleur plus fréquentes…), il n’est pas toujours simple de s’imaginer quelles sont déjà -et quelles seront demain- les conséquences pour notre santé de ces bouleversements climatiques qui s’annoncent…
Petit tour d’horizon (non exhaustif) :
Dès 1998, les pouvoirs publics français prévenaient(1) : certes, les hivers rigoureux s’éloigneront et par voie de conséquence, les risques de décès liés aux hypothermies : recul de 5 à 7% du nombre de décès en hiver (question au passage : a-t-on besoin d’attendre le réchauffement climatique pour épargner aux plus fragiles d’entre nous ce fléau ?), mais les vagues de chaleur conduiront à une augmentation de 12 à 18% de la mortalité en été, par maladies cardiovasculaires et affections respiratoires. On observera aussi plus de risques de déshydratation, de diabète, coliques néphrétiques, intoxications alimentaires…
Plus récemment, un rapport(2) de l’Institut de Veille Sanitaire, en mai 2010, annonce avec nettement plus de certitude de nombreux autres effets, on ne parle plus dans le titre du document d’impacts « potentiels »
mais juste « d’impacts » :
- augmentation de la pollution atmosphérique, et des pathologies respiratoires cardio vasculaire associées ;
- augmentation des allergies polliniques par augmentation de la production de pollens et de la durée de la période de pollinisation ;
- augmentation de certains types de cancers liés aux produits de chloration de l’eau utilisés en plus grandes quantités du fait de températures des ressources en eau plus favorables au développement microbien ;
- augmentation de certains cancers hépatiques liés aux toxines des cyanobactéries (agents toxiques sécrétés par les « algues bleues »). Le milieu naturel devenant plus favorable au développement de ces organismes ;
- augmentation des infections liées à des bactéries (légionelloses, salmonelloses…) ;
- augmentation de maladies liées à des parasites (maladie de Lyme, fièvre Q…), à des moustiques (dengue, chikungunya, fièvre Jaune, paludisme, west nile…) ;
- même des risques sur la santé mentale sont envisagés, du fait notamment du fort impact psychologique des événements extrêmes qui sont appelés à se multiplier.
Mais un des risques les plus préoccupants est peut-être celui lié à des congénères de « Mollivirus sibericum ». Il s’agit d’un virus géant de plus de 30 000 ans ainsi nommé du fait qu’il soit particulièrement mou mais aussi qu’il ait été découvert très récemment dans les sols gelés de la Sibérie. Cette région du monde connait, à l’instar des zones situées dans la proximité du cercle polaire arctique, une évolution radicale : la fonte du sol qui y était gelé en permanence (on parle de permafrost ou de pergélisol). Le dégel de ce sol figé depuis des dizaines de milliers d’années provoque la décongélation de composés vivants qui y ont été emprisonnés. Non seulement ces sols en décongélation émettent des gaz qui participent au réchauffement climatique (un risque supplémentaire d’emballement de la machine climatique), mais ils laissent revenir à la vie des microbes contre lesquels nous n’avons probablement plus la moindre immunité. En quelques années, c’est la 4ème famille de virus géants qui retrouve la vie après cette prison de glace de 30 000 ans. Heureusement pour nous, aucune de ces 4 familles n’est infectieuse chez l’Homme…
Jusqu’à quand aurons-nous cette chance ?
Une de ces familles a été décrite dans la revue Science en 2013, c’est celle des Pandoravirus. Référence à la mythologie et cette boite de Pandore que nous ouvrons lentement. Tous les efforts doivent être faits pour la refermer le plus vite possible. Notre avenir commun est àce prix. Agissons dès aujourd’hui, sans attendre un hypothétique accord international. Nos comportements individuels (transports, alimentation, chauffage…) sont les premiers leviers d’action. Le site de l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie) : http://www.ademe.fr/ fourmille d’actions concrètes que chacun peut mettre en place.
Nous ne pourrons pas dire demain que nous ne savions pas.
(1) « Impacts potentiels du changement climatique en France au XXIe siècle». Rapport du groupe d’experts réalisé à la demande de la Mission Interministérielle de novembre 1998.
(2) «Impacts sanitaires du changement climatique en France Quels enjeux pour l’InVS ? ». Mai 2010