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Le sevrage ambulatoire

Le sevrage ambulatoire

Le sevrage ambulatoire ?

Pour comprendre le sevrage ambulatoire, il faut d’abord comprendre le sevrage. Même si le sevrage « alcool » n’est pas une urgence médicale, celui-ci est vécu comme tel par les malades alcoolodépendants. En effet, c’est une décision importante pour le malade, qui aura parfois nécessité plusieurs mois (voire des années) : il attend une réponse rapide de notre part, les professionnels de santé. En 1999, une conférence de consensus « Objectifs, indications et modalités du sevrage du patient alcoolodépendant » avait précisé que « le sevrage nécessite une prise en charge médicalisée, avec l’appui concerté de différents intervenants. Pour assurer la qualité des soins et la sécurité du sevrage, une formation de chacun de ces intervenants est nécessaire. »

 

Indications et avantages du sevrage ambulatoire

Les avantages sont nombreux :

  • la poursuite de l’activité professionnelle ;
  • le maintien des relations familiales et sociales ;
  • une meilleure acceptation car il n’oblige pas à assumer socialement le statut de malade ;
  • la compatibilité avec un syndrome de sevrage modéré ;
  • la participation du patient et de son entourage.

De plus, il n’implique pas de moyens techniques importants.

 

Contre-indications du sevrage ambulatoire

Il faut les connaître, afin d’éviter un échec ; elles sont :

  • alcoologiques : une dépendance physique sévère (signes de manque), des antécédents de delirium tremens ou de crise convulsive généralisée, l’échec d’un essai sincère d’un sevrage ambulatoire antérieur ;
  • somatiques : une affection somatique sévère justifiant une hospitalisation (une cirrhose du foie, par exemple) ;
  • psychiatriques : syndrome dépressif ou autre pathologie psychiatrique sévère associée ;
  • socio-environnementales : demande pressante de l’entourage familial ou professionnel ; entourage non coopératif ; processus avancé de désocialisation.

Il ne faut oublier l’existence d’une dépendance associée à d’autres produits psychoactifs (une dépendance aux benzodiazépines ou au cannabis, par exemple). Un sevrage institutionnel de deux ou trois semaines est alors nécessaire.

Selon les critères des études et les caractéristiques des malades, de 10 à 30 % des malades sont exclus du sevrage ambulatoire.

 

Les acteurs du sevrage ambulatoire

Le sevrage va se dérouler au domicile du patient, ce qui est bien différent du milieu hospitalier où toutes les ressources sont présentes (médecins, infirmiers, éducateurs, psychologues) et les activités individuelles et collectives.

Le patient est au centre du projet thérapeutique, et les acteurs sont nombreux : l’infirmier(ère) qui passera à domicile une ou deux fois par jour, le médecin généraliste référent, l’équipe du CSAPA  qui prendra le relais après le sevrage (accompagnement médico-psycho-social).

 

Déroulement du sevrage ambulatoire

Il faut tout d’abord que le patient soit motivé et prêt pour cette démarche, et qu’un protocole de soins clair et précis soit établi : un exemplaire sera adressé au centre infirmier (qui assurera les soins à domicile), et un autre au médecin généraliste référent. Un arrêt de travail sera prescrit, d’une à deux semaines ; parfois, certains patients effectueront leur sevrage durant leurs congés. Voici les éléments que nous avons mis dans le protocole que nous utilisions au CSAPA Lyade Garibaldi , à Lyon :

  • surveillance et administration du traitement (selon l’ordonnance établie au départ),
  • contrôle du pouls, de la tension artérielle, de la fréquence respiratoire, recherche de sueurs, tremblements, agitation et troubles sensoriels, afin d’établir le score de Cushman ,
  • adaptation si nécessaire de la posologie médicamenteuse (prescription de benzodiazépines) en fonction du score de Cushman,
  • surveillance de l’hydratation (2 à 3 litres par jour).

La visite à domicile par un IDE sera effectuée matin et soir pendant les trois premiers jours, puis chaque matin durant les sept jours suivants. Il s’agit de prévenir la survenue d’un accident de sevrage, et de crises convulsives en particulier (en augmentant la posologie des benzodiazépines, si le score de Cushman s’est modifié).

 

Un programme de sevrage alcool ambulatoire sur Lyon (le PSAAL)

Depuis 2013, un programme original financé par l’Agence Régionale de Santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes est proposé par la Maison du patient à Lyon. Lorsqu’un médecin généraliste a dans sa patientèle un patient qu’il estime éligible au PSAAL, il l’adresse avec un bilan biologique à l’infirmière coordinatrice, Madame Nathalie Roche ; avec le médecin coordinateur du PSAAL, il évalue la pertinence de la demande. Si le sevrage ambulatoire est possible, l’infirmière coordinatrice l’organise en contactant des infirmières libérales du réseau d’infirmiers(ères) formées en addictologie et au suivi des sevrages alcool en ambulatoire, en collaboration étroite avec le médecin généraliste. Celui-ci voit son patient en début de sevrage pour la prescription du traitement et des soins infirmiers ; il le reverra au 3ème et au 10ème jour.

Ainsi, de nombreux cabinets médicaux et infirmiers ont été démarchés, rencontrés, formés, en lien avec les ELSA  et les CSAPA . Plus de trente patients ont bénéficié en 2013 de ce type de sevrage, dans le cadre de ce programme de soins original, initié et porté par Serge Luc, infirmier addictologue maintenant à la retraite. Depuis, c’est 20 à 30 patients qui en bénéficient chaque année (sur 50 à 70 demandes initiales), mais cela nécessite au départ l’implication du médecin généraliste référent, indispensable pour initier cette prise en charge. Cela sous-entend également que ces derniers soient sensibilisés, formés à cette approche.

A notre connaissance, il n’existe pas en France d’équivalent du PSAAL, alors que cela permettrait à de nombreuses personnes de se sevrer de l’alcool tout en restant à domicile, sans rupture avec leur milieu familial en particulier.

 

Connaissiez-vous cette possibilité offerte à certains malades dépendants de l’alcool ?

Qu’en pensez-vous ?

Est-ce pour vous une avancée dans la prise en charge de la maladie alcoolique ?

 

Ressources :

Pour aller plus loin :

 

Auteurices :

  • ARVERS Philippe (DR – Médecin addictologue et tabacologue)
  • l’équipe Offre Prévention de la Mutualité Française

 

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