Les nanomatériaux et la santé
- VATON Laurence (Consultante / Formatrice)
- Equipe Offre Prévention de la Mutualité Française
L’essentiel
Les nanomatériaux sont des substances chimiques, de taille nanométrique, manufacturées en vue d’une utilisation industrielle. Ils doivent posséder au moins une de leur dimension comprise entre 1 et 100 nanomètres. Ils sont utilisés pour leurs caractéristiques spécifiques, comme la résistance des nanotubes de carbones ou les propriétés antibactériennes des nanoparticules d’argent…
On dénombre aujourd’hui dans le monde plus de 1600 produits de grande consommation contenant des nanomatériaux dont 440 sur le marché européen. On les trouve principalement dans les secteurs de l’industrie cosmétique et de l’hygiène, dans le bâtiment et l’industrie textile. Ils sont également présents dans l’industrie agroalimentaire, dans le secteur électronique, l’industrie pharmaceutique…
L’impact des nanomatériaux sur la santé et sur l’environnement est très mal connu pour l’instant car les nanotechnologies sont d’apparition récente.
La très petite taille des nanomatériaux leur permettrait de franchir aisément les barrières cutanées, digestives et bronchiques et de se disséminer ensuite dans l’organisme en empruntant les voies sanguines et lymphatiques. De même, ils pourraient se disséminer très facilement dans l’environnement.
Des études ont montré que les nanomatériaux s’accumulent dans les organismes vivants et contaminent l’intégralité de la chaîne alimentaire. Des effets négatifs sur le cœur, les reins, les poumons, le système reproducteur et le cerveau ont été mis en évidence chez l’animal. Les nanomatériaux sont fortement soupçonnés d’être génotoxiques et cytotoxiques.
Il est actuellement très difficile de se protéger des nanomatériaux car leur présence n’est pas encore mentionnée sur les étiquettes des produits de consommation courante, mais la réglementation évolue. Aujourd’hui, la contamination par les nanomatériaux a le plus souvent lieu dans le milieu professionnel. Pour l’instant, en matière de prévention des risques, il n’existe pas de réglementation spécifique concernant les nanomatériaux.
Que sont les nanomatériaux et à quoi servent-ils ?
Qu’appelle-t-on nanomatériaux ?
La réglementation française donne une définition précise de la substance à l’état nanoparticulaire (décret n° 2012-232 du 17 février 2012). Simplement, les nano-objets sont des éléments dont au moins une dimension est à l’échelle nanométrique. Le nanomètre, abrégé en nm, représente un milliardième de mètre. Un nanomètre est 30 000 à 100 000 fois plus fin que l’épaisseur d’un cheveu. Les nano-objets peuvent avoir une forme de feuillet (les nanofeuillets), de fibre (les nanotubes) ou de particule (les nanoparticules).
Les nanomatériaux sont d’origine anthropique. Ce sont des nano-objets, des agrégats ou des agglomérats de ces nano-objets. Ils peuvent donc prendre la forme de nanoparticules, de nanofibres ou encore de nanofeuillets. Il s’agit de substances produites intentionnellement par l’homme en vue d’une application industrielle, comme les nanoparticules de dioxyde de titane, les nanotubes de carbone, des céramiques, des polymères…
Pour être appelés nanomatériaux, les objets manufacturés de taille nanométrique doivent posséder au moins une de leur dimension comprise entre 1 et 100 nanomètres, ce qui représente le domaine intermédiaire entre la taille des atomes et les matériaux massifs. Cette dimension confère à la matière des propriétés physico-chimiques particulières.
Pourquoi utilise-t-on les nanomatériaux ?
Les propriétés physiques et chimiques des matériaux se modifient lorsque la taille des particules atteint la taille nanométrique. À cette échelle, les matériaux obéissent à de nouvelles lois de comportement, celles de la physique quantique, et de nouvelles propriétés apparaissent et déterminent leur fonctionnement. Un matériau isolant peut ainsi devenir conducteur, un matériau opaque peut devenir transparent, un matériau fragile, ultra-résistant… Par exemple, les nanotubes de carbone, 100 fois plus résistants que l’acier, permettent de construire des raquettes de tennis extrêmement légères ; le dioxyde de titane, sous sa forme nanométrique, est utilisé pour réfléchir les UV tout en assurant la bonne fluidité des crèmes solaires…
Les nanotechnologies représentent un véritable enjeu technologique. Les perspectives sont immenses, notamment dans le domaine de la santé. Le marché devrait croître exponentiellement d’ici 2015.
Où trouve-t-on les nanomatériaux ?
Les nanomatériaux représentent un nouveau marché en pleine expansion. Peu d’informations concernant leur présence dans les produits de consommation sont disponibles.
On dénombre aujourd’hui dans le monde plus de 1600 produits de grande consommation contenant des nanomatériaux dont 440 sur le marché européen. Le nanomatériau le plus utilisé serait le nano argent, suivi du dioxyde de titane et des nanotubes de carbone.
Pionnière en Europe, la France a instauré une obligation pour les fabricants, distributeurs et importateurs de déclarer l’identité, les quantités et les usages des nanomatériaux qu’ils mettent sur le marché. Le premier rapport de l’Anses a été rendu public le 29 novembre 2013. Plus de 500 000 tonnes de nanomatériaux ont été introduites sur le marché français en 2012. Plus de 3400 déclarations ont permis d’identifier les substances utilisées en plus grandes quantités, le noir de carbone en tête puis le dioxyde de silicium, le carbonate de calcium, le dioxyde de titane et enfin l’oxyde d’aluminium.
Les nanomatériaux sont essentiellement utilisés dans :
- les revêtements, peintures, solvants et diluants,les cosmétiques et produits de soins personnels : crèmes solaires, rouges à lèvres…
- la formulation de préparations et/ou le reconditionnement.
De façon générale, on les trouve également dans les secteurs :
- de l’industrie textile : vêtements aux propriétés antibactériennes, lunettes…
- de l’industrie des équipements : machines, véhicules ou autres matériels de transport…
- de l’industrie agroalimentaire : compléments alimentaires, additifs, emballages alimentaires anti-bactériens…,
- de l’électronique : téléphones portables, micro-ordinateurs…,
- de l’énergie : cellules photoélectriques, isolants…,
- de l’industrie pharmaceutique : pansements aux nanoparticules d’argent, imagerie médicale, implants…,
- de l’industrie des produits phytosanitaires,
- des procédés de traitement des eaux,
Les nanomatériaux sont également présents, sous forme résiduelle, dans l’environnement.
Les nanomatériaux présentent-ils un risque pour la santé ?
Des connaissances lacunaires
L’impact des nanomatériaux sur la santé et sur l’environnement est très mal connu pour l’instant car les nanotechnologies sont d’apparition récente. Seul un très faible pourcentage des études sur les nanomatériaux concerne les risques pour la santé et l’environnement.
Or, les connaissances sur les propriétés physico-chimiques et la nocivité des substances micro ou macroscopiques ne sont pas transposables à leur forme nanométrique.
En effet :
- Chaque nano-objet a un potentiel de toxicité qui lui est propre.
- Leur surface spécifique (c’est-à-dire leur surface par rapport à leur masse) étant beaucoup plus importante que celle des objets micro ou macroscopique de même nature chimique, leur capacité d’interaction avec les organismes vivants ou avec d’autres substances s’en trouve démultipliée. Certains nanomatériaux présentent une toxicité plus grande voir même différente et des effets inflammatoires plus importants, à masse équivalente, que les objets micro ou macroscopique de même nature chimique.
- L’exposition à de faibles doses peut engendrer un effet nocif.
- Les nanomatériaux pourraient également servir de vecteur d’entrée dans le corps à d’autres polluants qui se fixent sur leur surface.
À l’heure actuelle, les chercheurs restent prudents sur la dangerosité des nanoparticules. Certaines études se contredisent empêchant alors d’aboutir à une conclusion définitive.
De plus, il n’existe pas encore de méthode standardisée permettant de suivre le devenir des nanomatériaux dans des environnements complexes comme le corps humain.
Des effets nocifs chez l’animal
La très petite taille des nanomatériaux leur permettrait de franchir les barrières cutanées, digestives et bronchiques et de se disséminer ensuite dans l’organisme en empruntant les voies sanguines et lymphatiques. De même, ils peuvent se disséminer très facilement dans l’environnement.
Les premières études montreraient que les nanomatériaux s’accumulent dans les organismes vivants et contaminent l’intégralité de la chaîne alimentaire. Des effets négatifs sur le cœur, les reins, les poumons, le système reproducteur et le cerveau ont été mis en évidence chez l’animal. Les nanomatériaux sont fortement soupçonnés d’être génotoxiques et cytotoxiques. Ainsi, il a été établi que les nanotubes de carbone peuvent provoquer des effets génotoxiques et inflammatoires notamment (voir notamment le rapport de l’Anses : « Toxicité et écotoxicité des nanotubes de carbone » – Novembre 2012). Leurs effets sur la santé dépendent de la voie d’exposition et de la dose : des effets tératogènes, des effets pathologiques respiratoires et cancérogènes ont également été démontrés.
Aujourd’hui, priorité est donnée aux études sur les nanomatériaux présentant des formes particulières comme les nanotubes qui pourraient avoir un impact sur la santé comparable aux fibres d’amiante ou encore aux nanomatériaux ayant une forte réactivité comme les catalyseurs. La recherche est également très active dans le secteur agroalimentaire et dans l’industrie cosmétique.
Où s’informer sur l’impact des nanomatériaux sur la santé ?
Attention : les contenus de ces ressources ne sont pas de notre responsabilité, et malgré le soin avec lequel nous les avons sélectionnés, nous ne saurions être tenus responsables d’erreurs éventuelles. |
Débats-publics Nanotechnologies
La Commission particulière du débat public (CNDP) a été missionnée par le gouvernement pour réaliser le débat sur les nanotechnologies en 2009. Le débat public qui s’est déroulé du 15 octobre 2009 au 24 février 2010 est à présent clos, mais la base de connaissances ainsi que les documents sont toujours disponibles en ligne.
VeilleNanos
Animé depuis 2010 par l’Association de Veille et d’Information Civique sur les Enjeux des Nanosciences et des Nanotechnologies (AVICENN), ce site propose « une information transversale couvrant l’ensemble des enjeux des nanosciences et des nanotechnologies : les enjeux sanitaires, environnementaux, économiques, politiques, sociaux, éthiques, etc. » essentiellement au niveau français et européen.
Comment se protéger des nanomatériaux ?
La protection de la population
La réglementation concernant les étiquetages évolue. Ainsi, depuis juillet 2013, tout produit cosmétique contenant un nanomatériau doit voir figurer dans la liste de ses ingrédients la mention [nano] à la suite du nom de la substance concernée. Des obligations d’étiquetage similaires sont entrées en vigueur depuis septembre 2013 pour les produits biocides et entreront en vigueur en décembre 2014 pour les produits alimentaires.
En France, depuis 2004, les pouvoirs publics ont mis en place plusieurs études afin de mesurer l’impact sanitaire et environnemental des nanomatériaux.
La France s’est également investie dans le projet Nanogenotox, lancé en mars 2010 à la demande de la Commission Européenne pour une durée de 3 ans. Ce programme, impliquant 11 Etats-Membres de l’Union Européenne et coordonné par l’Anses, visait principalement à fournir une méthode alternative, robuste et fiable de détection du potentiel génotoxique des nanomatériaux, susceptible d’engendrer un risque de cancer ou de toxicité pour la reproduction chez l’homme.
Depuis le 1er janvier 2013, la France oblige les industriels à déclarer la fabrication, la distribution et l’importation de nanomatériaux sur le territoire ainsi que leurs usages sur le site Internet R-Nano. L’Anses est chargée de la gestion de ces déclarations et dois présenter les données de l’année N-1 au public tous les 1ers novembre. Des dérogations peuvent toutefois être accordées afin de ne pas porter atteinte au secret industriel ou commercial ou encore dans le cas d’impératifs liés à la défense nationale. Pour l’instant, cette déclaration est unique en Europe.
La protection en milieu professionnel
La contamination par les nanomatériaux a le plus souvent lieu dans le milieu professionnel. Pour l’instant, en matière de prévention des risques, il n’existe pas de réglementation spécifique concernant les nanomatériaux. La fabrication des nanomatériaux est soumise à la réglementation du code du travail relative à la sécurité et à la prévention du risque chimique concernant les obligations de l’employeur, la protection collective, l’information des salariés, le suivi médical…
L’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) incite toutefois les industriels à adopter des mesures spécifiques de protection.
L’INRS incite également les industriels à utiliser ce nouveau pictogramme pour signaler la présence de nanomatériaux dans les locaux de travail, les armoires de stockage, les équipements…
Références
Sources
- Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Bilan de la première année de déclaration
- Actu-environnement, l’actualité professionnelle du secteur de l’environnement. Nanomatériaux : entre défis et précaution, la science avance. Mai 2013.
- Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Evaluation des risques liés aux nanomatériaux. Février 2013.
- Association Santé Environnement France (ASEF). Les nanoparticules, petites mais toxiques?. Juin 2012.
- Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST). Rapport R-558: Les effets sur la santé reliés aux nanoparticules. Substances chimiques et agents biologiques: études et recherches. Avril 2008.
- Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). Nanomatériaux.
- Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Dangers et risques: nanomatériaux.
Rédaction
- l’Equipe Offre Prévention de la Mutualité Française
- Laurence Vaton