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Des pièges diététiques : l’été meurtrier ?

 

tomate mozza

Auteurs :

  • LALAU Jean-Daniel (Pr – Médecin nutritionniste)

 

Des pièges diététiques : l’été meurtrier ?

L’interview d’une collègue nutritionniste réalisée il y a quelques années par une grande chaîne télévisée nous annonce que nos classiques de l’été – la salade « tomates-mozzarella », le « melon-jambon de Parme », le pain bagnat, les glaces, et même les fruits – sont, je la cite, des pièges diététiques.

Alors là, vous qui m’avez vu tenir de temps à autre des propos libres ; adopter une posture critique, voire frondeuse, je vous préviens : je vais piquer une grosse, une sainte colère !

 

Une colère d’abord contre moi

Car c’est de ma faute. Je tente de me disculper (« Mais, votre Honneur, j’ai regardé la télé parce que j’étais inquiet pour l’Égypte »), mais je n’aurais pas dû ; je n’avais qu’à ne pas la regarder, cette télé.

J’aurais dû me rappeler l’expérience du romancier John Irving. Ce dernier a rapporté avoir eu un accident, avoir fait une rechute. Non pas de cheval, mais il a craqué : il a acheté un journal.

Moi, c’est pareil, j’ai regardé la télé.

Festival de l’été

D’un autre côté, je me dis que si je n’avais pas fauté, si je n’avais pas regardé cette fichue télé, je n’aurais pas pu réagir pour vous, ni proposé de rééquilibrer un déséquilibre patent.

Car les pièges annoncés sont multiples. Attention, terrain miné :

  • Le melon au jambon de Parme : ça commence bien. Il y a nettement plus de lipides que dans le jambon de Bayonne ;
  • La tomate avec de la mozzarella : vous aggravez votre cas ! Vous ne saviez pas que c’est généreusement arrosé d’huile d’olive, et que le gras, c’est gras ?
  • Le pain bagnat : mais vous ne saviez pas non plus que ce nom signifie « pain mouillé par de l’huile d’olive » ?
  • Les fruits, oui même les fruits, bandes d’ignares : ils sont, je cite, « gorgés de sucre » !
  • Et les glaces ? Glaçant ! Alors là, vous jouez vraiment avec votre vie ! Vous pouvez faire toute la galerie, les glaces comportent à la fois du sucre et des lipides. Double peine, en quelque sorte.

C’est cuit !

Vous avez beau dire que vous faisiez attention à limiter les cacahuètes à l’apéro, que vous vous interdisiez désormais de faire cuire au barbecue des saucisses dégoulinantes de graisse, de proposer des chips en accompagnement, et d’offrir enfin des magnums glacés au dessert ; vous avez tout faux quand même.

N’oubliez jamais ceci : quand on a faux, la camarde rode avec sa faux !

Le menu haché

Tenez-le vous pour dit. Et droits dans vos tongs de plage.

Aussi à partir d’avant-hier, vous allez manger :

  • En entrée, des concombres. C’est bon pour le visage, et donc pour la bouche aussi. Mais avec un tour et demi du poivrier, malheureux. Sinon, c’est mauvais pour l’estomac ;
  • Une pomme de terre à l’eau de cuisson, de moins de 150 grammes (n’oubliez jamais : trop c’est trop) ; 
  • Des haricots verts, ad libitum et avec le droit à un demi-tour de la salière. Mais en sens inverse des aiguilles d’une montre, parce que sinon on fait tomber le sel non encore libéré par l’opération précédente ;
  • Du fromage ? Mais vous avez vraiment besoin de calories, alors qu’il fait 37° C à l’ombre ? Enfin quoi, un peu de retenue !
  • Des fruits, oui, mais ceux qui ont grandi à l’ombre. Vous voyez ceux qui sont savoureux ? Eh bien, ceux-là, vous ne les prenez pas. Mais d’où croyez-vous que vient l’expression « péché mortel » ?

Cet extra

Finalement, la recommandation à établir n’est plus de se serrer la ceinture la semaine pour se payer un extra le week-end. Il vaut mieux éradiquer le plaisir tout au fil de l’année, y compris pendant le temps des vacances. Ne jamais baisser la garde !

Ou alors, à l’extrême rigueur, le jour en plus des années bissextiles ; parce que, les mangeurs, vous savez, c’est comme les gosses : on leur donne ceci, et ils mangent cela (c’est-à-dire bien plus).

Comme ça, au moins, c’est la crise encore et toujours : la crise pendant l’année de travail, et la crise aussi l’été, pour savoir comment on va bien pouvoir se dépatouiller pour s’alimenter correctement avec toutes les injonctions contradictoires.

Colère !

Je réagis donc : honte au métier de nutritionniste ! Mais avec des messages de cette nature, vous avez perdu la tête, ou quoi ?

  • Mais c’est quoi le problème du jambon de Parme, quand on prend une tranchette ? Vous pensez vraiment qu’au prix où est le gras, on prend des tranches de 100 grammes, avec alors une quantité de graisse vraiment significative ?
  • Mais c’est quoi le problème de l’huile d’olive avec les tomates, quand on n’a pas pris de petit-déjeuner parce qu’on se repose en été, et que l’on peut ainsi transférer les lipides du matin sur un autre repas ?
  • Mais c’est quoi, idem, le problème de l’huile d’olive du pain bagnat, alors que cette quantité d’huile ne représente même pas celle des lipides d’assaisonnement recommandée pour un repas ?
  • Mais c’est quoi le problème des lipides des glaces, quand on prend une boule ou deux ?
  • Mais c’est quoi le problème des calories des fruits, quand les calories issues des sucres ne sont pas stockées dans les conditions habituelles de notre alimentation ?
  • Et c’est quoi, à la fin des fins, ce compte inepte de calories, des calories qu’il faut toujours pourchasser, quand on voit que, même sans faire trop attention à son alimentation en vacances, on perd souvent du poids malgré tout ?

P.S. (Presse à Sensation)

Décidément, avec leurs calories, ils sont vraiment lourds à la télé !

Je comprends maintenant pourquoi on dit : « gros titres » ; et aussi : « caractères gras », « médias de masse », « poids lourds du journalisme ».

N’empêche qu’on devrait sous-titrer certains reportages à l’antenne : « Dire des bêtises à l’antenne tue, de mort insidieuse ».

 

Mais à quand le radar antibêtise ?

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