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L’impact des pesticides sur la santé

 

pesticide

Auteurs :

  • ALLAIS Claire (Dr – Médecin généraliste)
  • VATON Laurence (Consultante / Formatrice)
  • Equipe Offre Prévention de la Mutualité Française

 

L’essentiel

La France est le quatrième utilisateur de pesticides à visée agricole au monde et le premier utilisateur européen. Les ventes de pesticides y atteignent environ 80 000 tonnes par an. Plus de 300 substances actives, contenues dans plus de 3000 préparations commerciales, sont utilisées dans le secteur agricole français. Plus de 100 substances actives, regroupées dans plus de 500 préparations commerciales, sont « autorisées en jardin amateur ».

Si les pesticides ont permis de grands progrès dans la maîtrise de la production des ressources alimentaires et dans l’amélioration de la santé publique, on s’aperçoit, depuis les années 50, que ces substances ont des effets délétères sur l’environnement et la santé humaine. Les controverses sont vives dans les milieux scientifiques et politiques car les liens de cause à effet sont difficiles à établir. Les pesticides sont toutefois soupçonnés de jouer un rôle dans l’augmentation des cas de certaines maladies telles que les cancers, les maladies neurologiques (maladies d’Alzheimer, maladie de Parkinson…), les maladies endocriniennes ou encore de participer fortement à la baisse de la fertilité constatée ces 60 dernières années.

La population est en contact étroit et quotidien avec une multitude de molécules nocives. L’alimentation est la principale source d’exposition aux pesticides. Les contaminants peuvent également être présents dans l’atmosphère, le milieu professionnel, ou dans l’air intérieur de nos maisons qui concentre un véritable cocktail de substances toxiques.

Pour protéger sa santé et préserver la biodiversité, il convient d’éviter au maximum d’utiliser des pesticides de synthèse et surtout de protéger les populations les plus vulnérables que sont les femmes enceintes et les enfants. Éviter de pulvériser de l’insecticide sur ses plantes d’appartement, pailler ses plates-bandes pour limiter les mauvaises herbes, laver soigneusement ses fruits et légumes avant de les consommer sont autant de gestes simples qui permettent de limiter son exposition aux produits phytosanitaires à la maison ou lors de ses activités de jardinage.

 

Qu’est-ce qu’un pesticide ?

Les pesticides sont des substances toxiques utilisées pour éliminer des organismes jugés nuisibles à la production agricole ou à la santé publique. Il existe une multitude de substances actives différentes.

Composé des mots latins « pestis » qui signifie « fléau » et “caedere” qui signifie « tuer », le terme « pesticide » est passé dans le langage courant en France dans les années 50, date à partir de laquelle l’utilisation de ces substances a doublée toutes les décennies. Le recours quasi systématique aux pesticides dans le secteur agricole comme dans la vie quotidienne, rend ses résidus omniprésents dans l’environnement. 

Une multitude de molécules différentes

Les pesticides sont le plus souvent obtenus par synthèse chimique, mais peuvent également avoir, plus rarement, une source biologique telle que des bactéries, par exemple.

Le produit pesticide est constitué :

  • d’une ou plusieurs substances actives, molécules toxiques qui agissent sur l’élément nuisible,
  • d’un adjuvant, substance chimique destinée à renforcer l’action des substances actives ou à faciliter l’emploi du produit final comme les solvants, les conservateurs,
  • ainsi que d’impuretés accidentellement intégrées lors de la fabrication.

En France, plus de 300 substances actives, contenues dans plus de 3000 préparations commerciales, sont utilisées dans le secteur agricole. 80% des pesticides utilisés en agriculture le sont pour les cultures des céréales, du maïs, du colza et de la vigne. Plus de 100 substances actives, regroupées dans plus de 500 préparations commerciales, sont « autorisées en jardin amateur » pour les particuliers.

Les pesticides appartiennent à plus de 150 familles chimiques dont les principales sont :

  • les organochlorés, très persistants dans l’environnement,
  • les organophosphorés, très toxiques, mais qui ont la faculté de se dégrader rapidement,
  • les pyréthroïdes
  • et les phytosanitaires qui sont les plus utilisés en France.

Des utilisations variées

Grâce à leurs propriétés toxiques, les pesticides sont utilisés pour prévenir, contrôler ou éliminer des organismes jugés nuisibles à la production agricole ou encore à la santé publique tels que certains animaux, des champignons, des insectes ou encore des plantes :

  • les herbicides éliminent les mauvaises herbes,
  • les insecticides éliminent les insectes,
  • les fongicides éliminent les champignons,
  • les rodenticides sont utilisés contre les rongeurs,
  • les molluscicides contre les escargots et les limaces,
  • les acaricides contre les acariens,
  • les nématicides contre les vers,
  • etc.

 Les pesticides sont également utilisés pour contrôler la croissance des plantes, améliorer le stockage et le transport des productions agricoles.

Les pesticides relèvent de quatre réglementations différentes :

  • les produits phytosanitaires ou produits phytopharmaceutiques à destination des agriculteurs, des jardiniers amateurs et du personnel d’entretien des espaces verts, des voies urbaines ou des voies de chemin de fer,
  • les produits biocides utilisés par exemple par les professionnels de l’industrie du traitement du bois, par les professionnels de l’hygiène publique. et dans une utilisation domestique,
  • les antiparasitaires à usage humain pour traiter la gale ou éliminer les poux par exemple,
  • les antiparasitaires à usage vétérinaire.

 

Quels sont les effets des pesticides sur la santé ?

Si les effets des pesticides sur la santé sont l’objet de vives controverses, ils sont toutefois soupçonnés de jouer un rôle majeur dans l’apparition de certains cancers, dans l’augmentation de certaines maladies neurologiques ou endocriniennes ou encore de participer fortement à la baisse de la fertilité observée ces dernières années.

La substance active contenue dans le pesticide, qui cible un ou plusieurs organismes jugés nuisibles, peut également être toxique pour des organismes vivants qu’elle ne cible pas.

Des effets sur la santé controversés

Si les intoxications aiguës par les pesticides sont facilement identifiables et font consensus, les effets sur la santé suite à une exposition chronique à de faibles doses fait aujourd’hui l’objet de controverses. Ces effets sont difficiles à établir en raison de plusieurs facteurs :

  • du fait de leur très grand nombre et de la multiplicité des modes d’exposition (inhalation, ingestion, exposition cutanée…), il est très difficile d’étudier les effets de chacune des substances actives sur le long terme,
  • les substances actives contenues dans un produit peuvent interagir entre elles, provoquant d’autres effets sur la santé. Des interactions peuvent également avoir lieu avec les adjuvants qui peuvent posséder leur propre toxicité ou majorer l’effet de la substance active, ou encore avec les impuretés accidentellement intégrées au cours de la fabrication du pesticide,
  • la population est par ailleurs en contact permanent avec une multitude de résidus de pesticides via l’alimentation, l’air… Or, cet « effet cocktail » est très peu étudié pour l’instant,
  • les maladies suspectées d’être induites par une exposition chronique aux pesticides, tels que les cancers, sont des maladies multifactorielles. Il y a donc quasi impossibilité d’établir un lien de cause à effet indiscutable. Les cancers en milieu agricole peuvent par exemple avoir pour cause une plus grande exposition au soleil, la proximité des virus du bétail…

Les intoxications aiguës

Les intoxications aiguës sont essentiellement répertoriées dans le milieu professionnel, par exemple lorsqu’un agriculteur est accidentellement exposé aux émanations de sa cuve de pesticides. Les symptômes dépendent du produit auquel les personnes ont été exposées mais le plus souvent sont retrouvés des céphalées, des brûlures des voies respiratoires et cutanées, des troubles digestifs.

Les cancers

L’impact de l’utilisation des pesticides sur l’augmentation des cas de cancers a été particulièrement mis en évidence avec l’utilisation du chlordécone dans les Antilles durant les années 70 à 90. L’utilisation de ces pesticides a en effet fortement majoré les cas de cancers de la prostate.

Si certaines études mettent en évidence une mortalité par cancers légèrement inférieure chez les agriculteurs par rapport au reste de la population, il apparaît que certaines localisations spécifiques sont surreprésentées dans cette même classe de population. Par exemple :

  • les cancers hématologiques,
  • les cancers hormonodépendants comme les cancers de la prostate, des ovaires ou du sein,
  • les tumeurs cérébrales,
  • les cancers de la peau,
  • les cancers du poumon,
  • les lymphomes non hodgkiniens (NHL),
  • et les sarcomes des tissus mous, cancers très rares dans la population adulte.

Une augmentation des cas de leucémies et de tumeurs cérébrales est soupçonnée chez les enfants dont les parents utilisent des pesticides chez eux durant la grossesse et la petite enfance. De plus, il semblerait que l’exposition professionnelle des parents augmente les risques de développer des cancers pour les enfants.

Les affections respiratoires

Les agriculteurs ont un risque plus élevé de développer des affections respiratoires comme l’asthme, par rapport au reste de la population.

Les perturbations endocriniennes

Les pesticides sont fortement soupçonnés de provoquer un dysfonctionnement du système hormonal. Par exemple, l’herbicide Round Up, le plus vendu au monde, est fortement soupçonné d’être un perturbateur endocrinien et de provoquer, après exposition d’un des deux parents, le doublement des avortements spontanés tardifs.

Les affections neurologiques

Les pesticides sont soupçonnés de provoquer une augmentation :

  • des syndromes parkinsoniens chez les agriculteurs et les personnes résidants près de parcelles sur lesquelles ont été épandues des pesticides,
  • des cas de la maladie d’Alzheimer,
  • des troubles de l’attention ou de l’humeur avec une augmentation de l’irritabilité, de l’anxiété et une augmentation des cas de dépression,
  • une réduction des capacités cognitives comme le montre l’étude Phytoner publiée en 2012
  • les pesticides sont également mis en cause dans l’augmentation des troubles d’hyperactivité avec déficit de l’attention (THADA) chez les enfants.

Les problèmes périconceptionnels

Les pesticides sont très fortement soupçonnés de jouer un grand rôle dans la baisse de la fertilité observée ces dernières années ainsi que dans l’augmentation des malformations in-utéro. Les scientifiques constatent :

  • une baisse du nombre de spermatozoïdes et de la qualité du sperme chez l’homme,
  • une augmentation significative des cas d’infertilité chez la femme,
  • une augmentation des faibles poids des enfants à la naissance,
  • une augmentation des cas de malformations génitales in-utéro telles que :
  • la cryptorchidie qui est l’absence de descente des testicules dans les bourses,
  • l’hypospadias qui consiste en une mauvaise position du méat urinaire,
  • des cas de micropénis,
  • mais aussi des anomalies du développement du cerveau impliquant des troubles neuropsychologiques et neurocognitifs.

Là encore, la population la plus touchée est celle des agriculteurs.

La mortalité

Enfin, l’exposition aux pesticides est corrélée à une plus forte mortalité 15 ans plus tard.

 

Quels sont les effets des pesticides sur l’environnement ?

Omniprésents dans notre environnement, les pesticides polluent l’air, les sols et les eaux souterraines ou de surface, mettant en danger de nombreuses espèces animales indispensables à notre survie.

Du fait de leur très large utilisation aussi bien en zone agricole qu’en zone urbaine, les pesticides sont omniprésents dans notre environnement. De plus, certains composés étant particulièrement persistants, tels les pesticides organochlorés pourtant interdits depuis une trentaine d’années, ils polluent l’environnement et s’accumulent dans les organismes vivants contaminant l’intégralité de la chaîne trophique. C’est par exemple le cas du chlordécone, interdit dans les Antilles en 1993, et pourtant encore retrouvé dans les prélèvements biologiques de 90 % des hommes adultes antillais.

La pollution des sols

Les sols sont très largement pollués par les pesticides en France, aussi bien en zone agricole qu’en zone urbaine où sont traités les voies de chemin de fer, les routes, les golfs, les hippodromes, les parcs, les jardins particuliers… Les différents pesticides se combinent, formant de nouveaux produits aux effets inconnus qui se retrouvent dans les plantes. Une partie de ces polluants est lessivée par les pluies et finit par polluer les cours d’eau de surface, s’infiltrent dans les nappes phréatiques…

La pollution des eaux

En France, la plupart des cours d’eau, de surface (plus de 95 % sont contaminés) comme souterrains, contiennent des pesticides. Nous en retrouvons donc logiquement sur les zones littorales. Le pesticide le plus couramment rencontré dans les eaux métropolitaine est l’herbicide et dans les DOM, ce sont plutôt les insecticides et les fongicides. Certains pesticides interdits depuis plusieurs décennies sont toujours présents dans les cours d’eau sous forme de résidus à cause du lessivage des sols par les pluies; C’est le cas de l’atrazine en France et du chlordécone dans les DOM. Même l’eau de pluie ou le brouillard contiennent des pesticides !

L’impact sur la biodiversité

La pollution des milieux aquatiques impacte la faune, très sensible au moindre changement de son biotope. On y remarque notamment une féminisation de certaines espèces de poissons, de batraciens ou d’alligators. La pollution par les pesticides impacte également la flore aquatique en provoquant une croissance incontrôlée des algues par exemple. La multiplication des algues vertes, dans les zones littorales bretonnes par exemple, est due à un excès de nitrates provenant des pesticides agricoles et industriels. En se putréfiant, ces algues dégagent notamment du sulfure d’hydrogène ou H2S qui est malodorant mais surtout qui est un neurotoxique et un irritant des voies respiratoires et peut être à l’origine d‘une hypersensibilité chimique multiple (MCS).

Les pesticides ont aussi un impact négatif sur les animaux terrestres. Les populations d’oiseaux diminuent régulièrement, directement intoxiqués par les pesticides ou indirectement en mangeant des aliments contaminés: poissons, graines… Les populations d’insectes auxiliaires baissent de façon dramatique. C’est le cas notamment des abeilles, victimes entre autre du Cruiser, nom commercial du thiaméthoxam, qui provoque des désorientations spatiales, les abeilles ne retrouvant plus leur ruche, et une mortalité multipliée par 2 ou 3. La France a décidé en juin 2012 l’interdiction de ce pesticide.

 

Quelles sont les situations d’exposition aux pesticides ?

Si l’alimentation est la principale source d’exposition aux pesticides, il ne faut pas négliger l’importance des autres sources de contamination comme l’intérieur de nos maisons qui concentre un véritable cocktail de substances toxiques.

L’alimentation, principale source d’exposition

La plupart des résidus de pesticides ingérés le sont via l’alimentation solide. Les aliments les plus contaminés sont les fruits et les légumes. En second plan, arrivent les céréales dont les traitements fongiques post-récolte se cumulent aux traitements reçus pendant la croissance des plantes. Puis viennent le lait et le vin.

En France, il est fréquent que l’eau de boisson, eau du robinet ou eau embouteillée, contienne des résidus de pesticides. En 2013, une enquête de l’association 60 millions de consommateurs en partenariat avec la fondation France Libertés a révélé des traces de biocides et de médicaments dans l’eau du robinet de plusieurs départements ainsi que dans certaines eaux en bouteilles. Une étude 18 mois plus tard confirme en partie ces résultats. Les taux de ces résidus sont le plus souvent en dessous des limites maximales de résidus (LMR) mais s’additionnent aux résidus de pesticides présents dans les aliments. En cas de dépassement des seuils autorisés dans l’eau du robinet, une alerte sera faite par la mairie de votre commune, le plus souvent par voie d’affichage, vous recommandant de ne plus boire l’eau du robinet pendant un certain temps.

L’environnement extérieur

En zone rurale et agricole, la contamination par les pesticides a souvent lieu au moment des épandages car les produits sont disséminés par le vent. Les concentrations de pesticides dans l’air sont donc plus marquées en été et dans l’arrière-saison et moins marquées en hiver. Ce phénomène a été mis en évidence par l’étude Airaq mené en 2011 dans 4 établissements scolaires de la région aquitaine. Plus la zone d’habitation est proche des zones agricoles, plus la contamination est importante.

Les habitants des zones urbaines ne sont pas plus à l’abri, certaines études montrant qu’on est encore plus exposé en milieu urbain. En plus des traitements des espaces verts, des voiries, le citadin est également victime des traitements effectués par les particuliers qui souvent ne respectent pas les conditions d’utilisation des produits phytosanitaires.

L’environnement intérieur

L’air intérieur est souvent encore plus pollué que l’environnement extérieur ! Se cumulent les pesticides utilisés sur les plantes d’appartement, les traitements insecticides médicamenteux humains tels que les traitements anti-poux ou vétérinaires comme les traitements anti-puces, les insecticides à diffusion lentes comme les anti-moustiques ou les anti-cafards, les produits de traitement des charpentes, les produits anti-moisissures, les résidus de pesticides véhiculés par les vêtements contaminés au cours de l’activité professionnelle.

Le milieu professionnel

L’exposition aux pesticides en milieu professionnel peut se faire lors de la fabrication, du stockage, du transport ou de l’utilisation des produits. Les agriculteurs sont soumis à une exposition plus longue et à des concentrations de polluants plus fortes que le reste de la population. Les agriculteurs sont exposés non seulement pendant la phase d’épandage mais aussi lors de l’achat, du transport, du stockage, lors de l’élaboration de la bouillie dans les cuves d’épandage, durant le nettoyage des outils après l’épandage. Les viticulteurs sont particulièrement exposés

Les professionnels intervenant dans l’entretien des voiries, des voies ferrées, des espaces verts, les professionnels de la désinsectisation, des soins vétérinaires ou de l’hygiène publique, les personnes travaillant dans le traitement du bois ou la manipulation de bois traité, les jardiniers et les paysagistes sont aussi concernés par ce problème.

Les catastrophes majeures

Il ne faut pas non plus minimiser le rôle des accidents, plus rares mais aux conséquences désastreuses. Il peut s’agir d’explosion d’usines ou de lieux de stockage des pesticides comme ce fut le cas en 1984, à Bhopal, en Inde. L’explosion de l’usine Carbide libéra un nuage toxique qui provoqua la mort de 16 000 à 30 000 personnes et qui fit 250 000 à 500 000 blessés souffrant de brûlures chimiques, de cécités mortelles. Aujourd’hui encore, des milliers d’habitants de Bhopal boivent une eau contaminée et vivent sur un site qui n’a jamais été nettoyé, la société n’ayant jamais pris en charge le nettoyage de la zone. Ce fut également le cas en 1976 à Seveso, en Italie, lorsqu’une fuite dans une usine fabriquant des herbicides provoqua la mort de centaines d’animaux et l’intoxication de la population, forcée d’évacuer la zone. D’autres « incidents », moins dramatiques, ont lieu très régulièrement dans le monde. 

 

La protection de la population par les pouvoirs publics

Pour assurer la sécurité du consommateur, les pouvoirs publics français et européens ont mis en place une série de mesures qui visent à limiter l’exposition des populations aux pesticides.

Un marché sous surveillance

Pour pouvoir être commercialisés, les pesticides doivent obligatoirement obtenir une autorisation de mise sur le marché (AMM) délivrée par le Ministère de l’agriculture. Cette demande doit être accompagnée d’un dossier toxicologique renseignant sur la toxicité du produit pour l’homme et l’environnement. Un suivi post-homologation est systématiquement mis en place. De plus, suite à l’action de l’association environnementale Générations futures, les décisions d’autorisation de mise sur le marché des pesticides sont à présent publiées sur le site de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).

Pour assurer la sécurité du consommateur, des limites maximales de résidus (LMR) de pesticides sont fixées au niveau national et européen, pour chaque fruit, légume, céréales mais aussi pour l’eau de boisson, et pour chaque pesticide. Ces LMR correspondent aux quantités maximales de résidus de pesticides sur produit non lavé et non épluché, à partir des bonnes pratiques agricoles fixées dans l’AMM du pesticide utilisé et pour l’agriculteur, indiqué sur l’étiquette du produit. Les LMR maximales de tous les aliments ingérés sur une journée type sont additionnées pour définir la dose journalière admissible (DJA) exprimée en mg/kg/j pour un type de population (en France, adulte ou bébé de 4 mois). La DJA est la dose maximale qu’un individu peut ingérer quotidiennement toute sa vie sans qu’il y ait d’effets néfastes sur sa santé. Les LMR prennent également en compte les pesticides qui ne sont plus autorisés mais dont la persistance dans l’environnement fait que la population y est encore exposée.

De plus, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et la Commission d’étude de la toxicité évaluent et surveillent continuellement l’exposition de la population et de l’environnement aux pesticides.

Une volonté de réduction de l’exposition aux pesticides

L’Union européenne et la France manifestent la volonté de réduire l’exposition de la population aux pesticides les plus dangereux. L’Union européenne contrôle la vente et l’utilisation des produits phytosanitaires et fixe des normes qui permettent d’assurer la surveillance et le contrôle des résidus de pesticides. Plusieurs programmes nationaux d’étude, de surveillance et d’action sont en cours actuellement :

Les pesticides les plus dangereux sont progressivement retirés du marché, tels :

  • l’atrazine retiré du marché européen en 2003,
  • l’hexachlorobenzene ou HCB interdit en France en 1988 et en 1993 en Europe,
  • les Polychlorobisphényls ou PCB interdits à la vente depuis 1987 en France,
  • le dichlorodiphényltrichloroéthane également appelé DDT dont l’utilisation est interdite en France depuis 1972 en raison de sa capacité à s’accumuler dans l’organisme et en raison de sa toxicité.

De plus, la nocivité des pesticides sur la santé est à présent reconnue par les tribunaux. Un gros fabricant de pesticides américains a ainsi été condamné en 2012 par le tribunal de Lyon pour l’intoxication d’un agriculteur charentais. L’état français a été condamné en mai 2012 à indemniser un agriculteur qui avait développé un cancer suite à une exposition à des pesticides.

 

Comment se protéger des pesticides ?

Il convient d’éviter au maximum d’utiliser des pesticides de synthèse et surtout de protéger les populations les plus vulnérables que sont les femmes enceintes et les enfants.

Se protéger des pesticides à la maison

Evitez l’utilisation de pesticides à l’intérieur quand vous le pouvez.

  • par exemple, les traitements anti-poux chimiques sont à bannir. Dangereux pour l’homme, ils entraînent une résistance des parasites à l’insecticide. Il faut privilégier les produits sans insecticides composés d’huile végétale qui asphyxie les poux, en complément d’un peignage effectué à l’aide d’un peigne dont les dents ne sont pas écartées de plus de 0,3 mm. Ce traitement sera répété autant de fois que nécessaire et complété par un lavage soigné des vêtements et des linges en contact avec la tête,
  • évitez les insecticides à diffusion progressive que l’on place à côté du lit pour éloigner les moustiques par exemple. Préférer les huiles essentielles ou l’installation de moustiquaires,
  • ne vaporisez pas de pesticides de synthèse sur les plantes d’appartement et privilégiez les traitements naturels.

 Se protéger des pesticides dans l’alimentation

  • mangez des produits biologiques si vous le pouvez. Sinon, pelez les fruits ou les légumes qui s’y prêtent et lavez soigneusement les autres,
  • ne pas proposer une eau dont la concentration en nitrates est comprise entre 50 et 100 mg/l aux femmes enceintes et aux nourrissons. Ne pas consommer ou utiliser pour un usage alimentaire une eau dont la concentration en nitrates est égale ou > à 100 mg/l,
  • respecter les restrictions d’eau décidées par les autorités en cas de pollution importante. Les recommandations sont alors diffusées à la population par voie d’affichage dans les mairies. Si la restriction dure longtemps, la mairie peut être amenée à fournir aux habitants de l’eau potable.

Vous avez la possibilité de connaître les niveaux de polluants présents dans l’eau de votre commune en consultant les résultats du contrôle sanitaire de la qualité de l’eau potable, commune par commune, sur le site Internet du ministère des Affaires sociales et de la Santé.

Se protéger des pesticides à l’extérieur

Jardiner en toute sécurité

Il faut respecter la biodiversité, signe de bonne santé du jardin. Les « mauvaises herbes » sont adaptées à votre région et fournissent un refuge à la faune locale et aux insectes auxiliaires. De même, les invasions d’insectes nuisibles sont souvent éphémères et les parasites disparaissent une fois que les conditions climatiques changent ou que la faune prédatrice a fait son travail. Il convient d’éviter au maximum d’utiliser des pesticides de synthèse, surtout au potager. On peut utiliser des produits utilisables en agriculture biologique vendu dans le commerce, ou mieux utiliser des recettes de grand-mères qui ont fait leurs preuves. Par exemple, pour limiter l’invasion de « mauvaises herbes » sans y passer tout son temps libre, on peut :

  • pailler autour des cultures ou composter en surface,
  • biner régulièrement. Ce procédé permet également d’économiser des arrosages,
  • pulvériser de l’eau de cuisson des pommes de terre ou de l’eau bouillante sur les plantes à éliminer,
  • etc.

Pour éloigner les insectes, il existe différentes astuces comme :

  • planter du persil pour éloigner les pucerons,
  • planter des œillets d’Inde au pied des tomates pour éloigner les nématodes,
  • mettre de la cendre de bois ou du sable autour des plantes que l’on souhaite protéger des limaces et des escargots,
  • etc.

Le petit guide santé du jardinage de l’Association Santé Environnement France (ASEF) et le site Jardiner autrement vous apprendront à jardiner sans recours aux pesticides.

Se promener en toute sécurité

  • évitez de vous promener avec votre famille à proximité d’une zone agricole sur laquelle un épandage de produits phytosanitaires est en cours ou vient d’avoir lieu,
  • évitez le picorer du blé, du maïs ou tout autre produit glané au cours d’une ballade sans l’avoir lavé,
  • lors de vos promenades le long du littoral, évitez les zones contaminées par les algues vertes. Les zones contaminées font, la plupart du temps, l’objet d’une restriction d’accès comme un affichage, une barrière. Une exposition, même à court terme, peut être fatale, surtout pour les enfants qui pourraient glisser, chuter dans les algues et inspirer une dose mortelle. Ces algues se reconnaissent facilement : elles sont de couleur verte et deviennent blanches en séchant. En se putréfiant, elles dégagent une odeur d’œuf pourri.

Si vous êtes amené à utiliser des pesticides de synthèse, pensez :

  • à utiliser les produits les moins nocifs pour vous et pour l’environnement en repérant les pictogrammes présents sur les étiquettes des pesticides,
  • à éviter les produits présentés sous forme de poudre qui pourraient être inhalée ou entrer en contact avec les muqueuses,
  • à éloigner les enfants et les femmes enceintes jusqu’à ce que les effets se dissipent,
  • à utiliser des protections appropriées tels que des gants, des lunettes, un masque,
  • à suivre les recommandations d’utilisation indiquées sur l’étiquette du produit,
  • à aérer la pièce pendant et après l’utilisation,
  • à vous laver soigneusement les mains après avoir utilisé des pesticides,
  • à ranger les produits hors de la portée des enfants,
  • à ne pas transvaser dans un autre récipient que le flacon d’origine,
  • à ne jamais mélanger deux pesticides,
  • à éviter de traiter vos plantes par temps venteux ou pluvieux.

 

Où s’informer sur l’impact des pesticides sur la santé ?

Pour vous informer sur les pesticides et la qualité de votre environnement, nous vous proposons une petite sélection de sites pratique.

Attention : les contenus de ces ressources ne sont pas de notre responsabilité, et malgré le soin avec lequel nous les avons sélectionnés, nous ne saurions être tenus responsables d’erreurs éventuelles.

S’informer sur les résidus de pesticides

L’Observatoire des Résidus de Pesticides (ORP) propose de nombreuses informations et adresses utiles pour en savoir plus sur les pesticides. 

S’informer sur la qualité de l’eau du robinet de votre commune

Pour connaître les niveaux de polluants présents dans l’eau de votre commune, vous pouvez consulter les résultats du contrôle sanitaire de la qualité de l’eau potable, commune par commune, sur le site Internet du ministère des Affaires sociales et de la Santé.

S’informer sur la qualité de l’eau de baignade

Vous pouvez consulter le site Eaux de baignade proposé par le ministère des Affaires sociales et de la Santé pour connaître la qualité des eaux d’un site de baignade en France ou dans les DOM-TOM.

S’informer sur la qualité de l’air

En France, la surveillance de la qualité de l’air est assurée sur tout le territoire par 26 associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA). Les AASQA sont réunies au sein de la fédération Atmo France. La fédération fournit un indicateur global de la qualité de l’air calculé pour les agglomérations de plus de 50.000 habitants à partir de la concentration dans l’air ambiant de quatre polluants (dioxyde de soufre (SO2), dioxyde d’azote (NO2), ozone (O3) et poussières fines (PM10)). L’indice de qualité de l’air croît de 1 (très bon) à 10 (très mauvais). Vous pouvez consulter la carte des AASQUA qui donne lindice de qualité de l’air par région.

S’informer sur les pollutions des sols

Le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie met à disposition une base de données des sites et sols fortement ou potentiellement pollués, la base BASOL. 

Les associations environnementales

  • l’association Générations futures agit pour la défense de l’environnement et de la santé, et s’applique entre autre à dénoncer les conséquences négatives de l’agriculture ou de toute autre activité humaine utilisant les produits phytosanitaires et les engrais de synthèse,
  • l’association Humanité et biodiversité s’attache à protéger le patrimoine naturel et la biodiversité,
  • l’association France Nature Environnement rassemble 3000 associations de protection de la nature et de l’environnement de France métropolitaine et des DOM-TOM. L’association lutte pour la préservation de l’environnement et la sauvegarde d’un environnement de qualité.

Apprendre à jardiner sans pesticides

Le site Internet Jardiner autrement apprend aux internautes à cultiver leur jardin sans le recours aux produits de synthèse.

 

Références

Sources

Rédaction

  • L’équipe Offre Prévention de la Mutualité Française
  • Laurence Vaton
  • Mise à jour par le Dr Claire Allais, médecin généraliste

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